Turbulences sur le commerce de flux
Au cours des 15 dernières années, le commerce de flux a connu une très forte croissance, tirée notamment par la hausse du trafic aérien et le développement du tourisme à l’échelle mondiale. Les ventes en duty-free et travel retail auraient ainsi quadruplé entre 2000 et 2019, dernière année faste du secteur.
Plusieurs groupes se sont fortement développés sur ce créneau, deux groupes français (LAGARDERE TRAVEL RETAIL et DFS) se plaçant dans le Top 6 en termes de chiffres d’affaires.
En matière d’immobilier commercial, le travel retail se caractérisait jusque là par des ratios hors normes favorisés par l’achat en duty free (évitant ainsi la TVA et les accises) et l’espace réservé en attente du départ de l’avion. On observait des paniers moyens élevés, des taux de transformation significatifs et des chiffres d’affaires au m2 inédits. Une étude de CUSHMAN & WAKEFIELD datée de décembre 2018 sur le commerce en gare rapporte des chiffres d’affaires en vente à emporter pouvant atteindre 50.000 € / m2 SdV.
Le rapport financier d’ADP pour 2019 indique un chiffre d’affaires par passager (et non par consommateur) de 19,7€ (pour un trafic de 108M de voyageurs).
Ces performances commerciales donnaient lieu à des taux d’effort qui auraient été jugés léonins en centres commerciaux, mêmes très performants. L’étude précitée de CUSHMAN & WAKEFIELD fait état de taux d’effort pouvant atteindre 25% en vente à emporter. Les curseurs étaient alors aux antipodes de la frugalité.
Dans le contexte pandémique actuel, « The Economist » questionne la pertinence des législations duty-free, non directement contributives en termes de finances publiques, favorisant l’alcool et le tabac et ne bénéficiant finalement qu’à une population déjà favorisée.
La remise en cause du modèle duty-free amène à s’interroger sur la nécessaire transformation du commerce de flux, mis à mal par la crise sanitaire, et qui participe pourtant activement au financement des équipements aéroportuaires eux-mêmes.
L’intense fréquentation des sites de flux et la flexibilité des conventions d’occupation en font usuellement un observatoire dynamique et pertinent des enseignes performantes. L’évolution du mix-merchandising des gares et aéroports à moyen-terme sera riche en enseignements.