L’encadrement des loyers à Paris, fausse bonne idée ?

L’encadrement des loyers à Paris, fausse bonne idée ?

Le paysage immobilier parisien est au cœur d’un débat continu sur l’encadrement des loyers à Paris, dispositif mis en place depuis le 1er janvier 2019 pour une période expérimentale se prolongeant jusqu’en novembre 2026.

LAtelier Parisien d’Urbanisme (APUR) vient de publier une étude portant sur les effets du dispositif. Cette étude est scrutée avec attention par les acteurs du marché puisqu’elle vise à évaluer les impacts du dispositif et à déterminer sa viabilité pour l’avenir, voire son étendue à d’autres territoires.

L’étude de l’APUR révèle que l’encadrement des loyers a permis de limiter la hausse des prix dans le parc locatif privé parisien. En moyenne, les locataires ont ainsi économisé 64 euros par mois, soit 768 euros par an. De plus, les effets de l’encadrement se renforceraient dans le temps.

Si l’encadrement des loyers semble avoir un effet bénéfique pour les locataires, il est important de s’interroger sur sa réelle efficacité en matière d’accès au logement pour les plus fragiles.

Même si l’idée de limiter la hausse des loyers peut être louable, elle ne peut être une fin en soi. L’objectif premier était en effet de permettre aux personnes exclues du logement – ou ayant des difficultés à se loger – de pouvoir (mieux) se loger.

En réalité, qui dit « plafonnement des loyers » dit « plafonnement des recettes fiscales ». Cette mesure a donc un coût, moins de recettes ou plus de dépenses (compensées en partie par plus de recettes) …

Pour évaluer pleinement l’impact de cette mesure sur son objectif premier, il conviendrait d’examiner l’évolution du revenu moyen des locataires parisiens avant et après la mise en œuvre de l’encadrement des loyers (chaque bailleur étant tenu de déclarer son locataire sur sa feuille d’imposition).

En l’état actuel, on peut simplement imaginer qu’un bailleur voyant son loyer plafonné continuera de sélectionner les meilleurs dossiers, donc les personnes qui avaient le moins besoin d’une aide au logement.

On peut également se demander si une approche alternative n’aurait pas été plus efficace. N’aurait-il pas été préférable de laisser les loyers libres et donc augmenter les recettes fiscales pour ensuite les redistribuer en direction des personnes ayant des revenus limitant leur capacité à se loger ? Par exemple, cela aurait pu prendre la forme d’APL ou d’une caution Visale aux critères d’obtention allégés ?

Ainsi, le surplus de recettes pourrait être exclusivement destiné aux personnes ciblées, contrairement à une aide généralisée via le plafonnement des loyers s’appliquant à la quasi-totalité des logements et bénéficiant d’abord aux personnes les plus aisées n’ayant par définition pas le plus besoin d’aide au logement.

Les dispositifs d’investissement de type PINEL avaient besoin de l’avantage fiscal pour inciter les bailleurs à louer aux personnes dont les ressources sont limitées, pouvons-nous croire que les bailleurs aujourd’hui continueront de le faire sans cette carotte fiscale ?

En outre, il convient de rester attentif aux possibles biais statistiques qui pourraient affecter les futures éditions de l’étude du dispositif d’encadrement des loyers. Parmi ceux-ci, on peut citer le blocage des loyers pour les logements classés en basse performance énergétique (DPE) ainsi que la forte tentation des bailleurs à sortir des régimes soumis à l’encadrement (baux civils, baux saisonniers, baux mobilité…).

En définitive, l’encadrement des loyers à Paris suscite un débat entremêlé de considérations économiques, sociales et politiques. Cette étude de l’APUR offre un premier éclairage sur les effets de l’encadrement des loyers mais son efficacité en matière d’accès au logement reste à démontrer.

L’objectif partagé est de garantir un logement abordable pour tous, en prenant en compte les différentes réalités économiques et sociales des locataires et des bailleurs. Des pistes d’amélioration, telles que l’aide directe aux locataires ou un ciblage plus fin du dispositif, méritent d’être explorées pour une politique de logement plus efficiente et plus juste.


Étude de l’ Apur – Atelier parisien d’urbanisme